La vie quotidienne sur un voilier
Quand on parle de voilier ou de transat’, on s’imagine bien des choses sur la vie quotidienne qui en découle. Alors comment ça marche la vie à bord d’un voilier ? On peut dire qu’il y a deux temps sur le voilier : lorsqu’on est en navigation et lorsqu’on est en escale.
La vie sur le voilier en navigation
Pendant la navigation, la vie à bord d’un voilier est rythmée par les quarts et les repas.
Les quarts : en quoi ça consiste ?
Les quarts, c’est comme ça qu’on appelle le moment où un équipier doit être en veille dans le cockpit.
Le cockpit c’est l’endroit d’où tu diriges le bateau. C’est là où il y a la barre et c’est aussi là que se trouvent les cordages pour gérer les voiles. D’ailleurs, on ne dit pas cordes mais bouts et on prononce « boute » (mêmes au pluriel, ça donne donc « les boutes »).
L’objectif du quart est de vérifier la route et la bonne marche du bateau. S’il y a quelque chose qui ne va pas, l’équipier appelle le capitaine pour qu’il confirme l’observation et qu’il décide ou non d’agir.
Pendant le quart tu observes tout :
Est ce que le vent est stable ? Le cap est-il toujours bon ? Est-ce que le régulateur d’allure (ou l’autopilote sur certains bateaux) fonctionne bien ? Est-ce que les nuages sont menaçants ? Tu regardes aussi beaucoup l’horizon : est ce qu’il y a quelque chose à l’horizon ? Si oui, tu te munis de ta paire de jumelle et du compas de relèvement.
Avec les jumelles, tu peux regarder dans quel sens le bateau est, ou à quoi il ressemble. Avec le compas, tu mesures sa trajectoire. En effet, le compas de relèvement c’est l’instrument de navigation de base. C’est comme une boussole de la mer. C’est un objet qui te permet, par rapport au nord magnétique, de regarder l’horizon en pointant un bateau (ou un rocher comme tu veux) et d’observer sa position (exprimé en degrés). A travers ton compas, tu vois donc la direction que prend le bateau. Et pour déduire comment il se déplace, tu relèves l’objet à différents intervalles de temps. L’objectif est de savoir si le bateau dans lequel tu te trouves et le bateau que tu observes, sont sur le même cap (et donc le même degrés). En gros, tu dois comprendre si les deux sont sur une route de collision ou non. Si c’est le cas, une petite manœuvre s’impose pour un changement de cap !
Sur le Zao, on avait chacun deux quarts de 2 heures et un mini-quart de 25 minutes. Le capitaine avait un quart de 2 heures la nuit, mais il était en veille tout le temps. Dès qu’on le sollicitait, peu importe l’heure, il était présent.
Les quarts de Julie c’était 6h-8h, 16h-16h25 puis 18h-20h. Pour Jerem c’était 10h-12h, 16h50-17h15 puis 22h-00h.
Comme on a navigué sur plusieurs fuseaux horaires pendant ces trois mois en voilier, on a décidé de garder l’heure de départ de France pour tout le voyage. C’était notre référence, qu’on a appelé « l’heure bateau » pendant tout le voyage.
Franchement c’était bien marrant pour plusieurs raisons. Nos horaires de quarts n’ont jamais changé (sauf une fois quand un équipier à débarqué à Madère et qu’on n’avait pas encore récupéré la nouvelle équipière aux canaries). Mais ce qui changeait, c’était la période de nos quarts.
Au début de notre route en voilier, les quarts de Julie étaient au lever du soleil et au coucher du soleil. A la fin, c’était la nuit et en pleine journée (et on finissait de manger le repas de midi au début de son quart de 18h). Ça nous a aussi créé des drôles de discussions et des nœuds au cerveau lors de nos différentes écales, entre l’heure bateau et l’heure locale. Mais au final, c’était chouette d’avoir les mêmes heures de quarts pendant ces trois mois.
Les repas : ce moment clé sur un bateau
Un équipage heureux et efficace, c’est un équipage repu ! Les phrases les plus entendues en navigation (à part parler de la navigation) c’est « qu’est ce qu’on mange à midi? », « qu’est-ce qu’on mange ce soir? », « qui veut un goûter? »
En navigation et à cause de nos horaires de quart, on finit tous par se croiser sauf aux repas. Y compris Jerem et moi. Sur le Zao, la règle c’était de manger ensemble le midi et le soir. Cette habitude est quand même géniale et plutôt cool car sinon on ne finit jamais de se croiser, sans partager un moment d’équipage ensemble.
Pour les repas, tout le monde met la main à la pâte. On décide ce qu’on mange, on épluche, on cuisine et on fait la vaisselle (à l’eau de mer!) ensemble. Enfin, pour ceux qui n’avaient pas le mal de mer et qui étaient debout !
On a très bien mangé sur le Zao et on a gardé de sacré bonnes recettes dans notre cahier de voyage. On a mangé beaucoup de chou blanc, de carottes et de patates (ça se conserve bien). Une précision pour plus de stabilité avec le roulis du bateau : on mange dans des bols avec des (petites) cuillères.
Il y aussi une autre chose importante : la fabrication du pain. Pour accompagner ces bons repas qui requinquent, quoi de mieux que d’avoir du pain frais fait maison ? Chaque jour pendant la navigation, l’un d’entre nous faisait du pain.
Donc à part les quarts et les repas, chacun vaquait à ses occupations (dormir -beaucoup-, lire, écrire, contempler…).
La vie pendant les escales
On a fait de nombreuses escales avec le Zao (voir les escales réalisées ici).
Lorsque tu t’arrêtes quelque part avec un voilier, deux choix s’offrent à toi : aller à la marina ou être au mouillage.
Avec le Zao, on a surtout été dans des mouillages (sauf une fois où on n’a pas eu le choix, à Baiona). Au mouillage, tu ancres ton bateau dans une baie et pour aller à terre tu dois utiliser l’annexe pour t’y rendre. La marina c’est un endroit rattaché au port. Tu as accès à un tas de services en échange d’un paiement (douches, bar, resto) et tu n’as pas besoin d’utiliser l’annexe car tu stationnes à un ponton. Ponton qui est relié à la terre, donc tu prends tes jambes et tu débarques !
En résumé, si on fait un parallèle avec le camping : le mouillage c’est du camping sauvage, et à la marina c’est du camping dans un camping organisé.
Avec le Zao, c’était mouillage tout au long des escales. Sauf une fois, à Baiona, car il y avait une compétition de bateau dans la baie. Hormis ces 2 jours à la marina parce qu’on n’avait pas le choix, on a toujours était au mouillage.
Une fois arrivé à bon port, on partait en mission visite, apéro, lessive ou douche. Ou même les 4 à la fois !
Débarquer à terre pour visiter
Comme on a vécu sur le Zao en mode mouillage, on était hyper dépendants de l’annexe. A chaque fois qu’on allait à terre, le capitaine nous déposait et venait nous chercher. On a eu de la chance d’avoir un capitaine méga cool sur ce point là! Il était toujours disponible pour nous, nous encourageait à aller visiter et s’est beaucoup adapté à nos envies de débarquer.
On débarquait la journée pour visiter, et le soir, Tom et Iza nous rejoignaient pour l’apéro. Après l’apéro, nous mangions tous ensemble le soir, soit dehors ou soit sur le bateau.
Donc aux escales, on a pas mal vadrouillé autour des lieux du mouillage. On a beaucoup marché et pris pas mal de bus. C’était vraiment chouette après chaque navigation de retrouver la « civilisation ».
Pour notre capitaine et son mousse, c’était surtout l’occasion de checker le bateau. Tom et Iza sont venus visiter à terre avec nous, mais leur priorité c’était de vérifier le bateau (les voiles, arranger ce qui était abimé pendant les navigations, avancer dans leur to-do-list d’amélioration du bateau…)
On avait aussi un rituel sur le Zao. Je crois qu’il est important de le mentionner car il était CAPITAL. Après chaque navigation, l’objectif premier (avant la douche et la lessive) c’était de boire un apéro pour fêter notre arrivée !
L’obsession de la douche et de la lessive
Sans parler de vadrouiller à terre, il y a deux points qui sont essentiels quand tu es au mouillage : trouver une douche et trouver une laverie. Après chaque navigation, le défi ultime de notre bande d’équipier c’était de trouver une douche et de quoi laver nos fringues pleines de sel.
Sur notre bateau, il n’y avait pas de douche mais c’est aussi le cas dans la grande majorité des bateaux. En effet, l’eau douce est une denrée précieuse réservée à la cuisine et l’hydratation. Alors oui, on peut faire des toilettes de chat à l’eau douce pendant les nav’, mais soyons honnête, ça ne remplace pas un bonne douche. Pendant la transat, on se lavait à l’eau de mer dans le cockpit et on prenait un grand verre d’eau douce pour se rincer.
Au fur et à mesure du voyage, on devenait moins exigeant une fois arrivé à terre. Une douche, que dis-je, un filet d’eau froide c’était le summum du luxe. On a fait pas mal de « douche sauvage » sur les plages quand c’était possible. On a aussi pris des douches aux bains publics dans les endroits où ça existe.
Tous ces mots sur les douches et l’eau douce, c’est parce que c’est une préoccupation de tous les jours sur un voilier. Combien on a consommé? Combien de jours estimés il reste à naviguer ? Est ce qu’on peut re-faire un plein d’eau avant de partir ou en arrivant? Où est-ce qu’on peut choper de l’eau douce? Est ce que c’est payant ? Tout cette problématique autour de l’eau, ça nous a aussi permis de comprendre à quel point la gestion de l’eau douce est importante. Et qu’on se rend même plus compte de la chance qu’on a d’avoir accès à l’eau potable, chaude et avec de la pression. Désormais, on y pense à chaque verre d’eau rempli et à chaque douche prise.